mardi 29 septembre 2009

Impressions d'un homme de pet sur des plantes éternellement mortes

Comme je nageais une brasse impassible, l’œil rivé sur la sexagénaire dont le dos méthodique se calait sur mon propre rythme d’avancement, je me demandais si mes flatulences pouvaient faire office de propulseur en milieu aqueux, et là-dessus, je m’interrogeais en arrière-plan sur la nécessité de partager de telles pensées dans ce journal. Il me venait que depuis Nietzsche, Wittgenstein, ou même avant Montaigne, nos expériences ordinaires, et le langage les décrivant, peuvent très bien faire l’objet d’une réflexion ouverte. Ceux qui s’en chagrinent à l’antienne de la «montée de l’insignifiance», ce sont les orphelins d’une philosophie et d’une métaphysique déjà mortes, ces fantômes croyant que l’on pouvait spéculer des volumes et des volumes sur des grands mots vides de référence dans la réalité et laissant donc au langage humain tout loisir de disserter dans le vide parfait, ces divagations donc qui ont bâti sur du sable d'immenses systèmes appelés à s’effondrer – et de fait effondrés avec force fracas.

Donc, le pet paraît un phénomène aussi discutable que l’esprit, l’âme ou je ne sais quelle généralité dont, au bout du compte, seule la science fabrique encore de grands récits explicatifs, laissant les autres discours à leur vanité ou leur vacuité. La science nous parle certainement aussi des flatulences, mais ces dernières peuvent néanmoins faire l’objet d’un discours non scientifique. Il est loisible à l’Homo sapiens de développer ainsi une chaire de sociologie du pet à la Sorbonne ou un Collège de philosophie du vent à Normale Sup, de même que je peux ici, et bien plus modestement, m’interroger à la manière analytique sur les conditions de vérité de la proposition «X pète souvent depuis qu’il a commencé un régime Dukan».

Au bord du Canal Saint-Martin, je croise sur le chemin du retour une boutique qui m’intrigue, Hortus Verde. Ma paresse congénitale est plus précisément attirée par un panneau indiquant «vraies plantes et fleurs stabilisées, sans eau, sans lumière, sans entretien». Dans un coin de mon appartement j'ai commencé des cultures de plantes grasses, qui demandent déjà peu d’effort au jardinier ingrat, mais cette offre me paraît encore un cran supplémentaire dans l’inertie. Des plantes vertes sans la main de même couleur, voilà qui me plaît bien. J’apprends que les propriétaires du lieu ont développé une technique de stabilisation des végétaux qui, une fois trempés dans un élixir de leur composition, arrêtent net leur photosynthèse et leur croissance, tout en évitant le pourrissement, du moins en milieu sec. J’en achèterai à l’occasion, mais ce n’est pas donné.

A peine quelques heures de sommeil, une matinée chargée et encore plein de choses à faire. Il est temps de préparer ma galette Dukan, premier met solide depuis 7 h. Oh à propos, j’avais noté quelque part de vous confier mon secret coupe-faim. Vers 2 h cette nuit, toujours insomniaque mais voyant se rapprocher l’heure du réveil imposé par un rendez-vous téléphonique aussi matinal qu’importun, je me suis fait une galette salée histoire que la sarabande des enzymes digestifs affaiblisse un peu ma vigilance. C’est la galette Dukan classique, mais à laquelle j'ai ajouté un mélange d’herbe «grillades mexicaines» de chez Ducros, et sur laquelle j’ai fait fondre deux carrés fromage Bridelight 3 %, ceux qui ont un vague goût de Vache-qui-rit. Eh bien c’est dé-li-cieux, croyez-moi.

Tout va bien

A 2:12 du matin, il me revient soudainement qu’un corbeau s’est posé sur le lampadaire, en face de ma fenêtre, et qu’il a regardé fixement dans ma direction. Serais-je superstitieux que j’y verrais un funeste présage. Ne l’étant pas, j’y vois l’effet du repeuplement aviaire du square voisin. D’ailleurs je photographie ma main, et n’observe rien d’anormal.


lundi 28 septembre 2009

Ecris avec ta merde!

La balance m’indique 65,6 kg en matinée : non seulement le yo-yo m’épargne, mais je stabilise au plancher. Il faut dire que je ne fais aucun excès, Maître Dukan m’a possédé : même pas envie de gras, de sucre, de rien. J’ai beau réfléchir à un maxi best of Big Mac ou à un kebab mayo ou à une entrecôte frites, rien. À Monoprix, j’ai acheté des pavés de truite, des champignons et des poivrons que je m’apprête à préparer au cuit-vapeur. C’est vous dire. J’en viens à ne pas savoir comment prendre du poids, et je suis terrorisé à l’idée d’en gagner en zone ventrale. Copain Alexandre, pas vu depuis deux semaines, me dit que mes bras ont maigri. Cela me désespère.

Dans le métro, une publicité de Biotrial dit : « Recherchons volontaires de 18 à 75 ans ». Les laboratoires font enfin des publicités pour leurs essais cliniques, je veux dire autre chose que des petites annonces dans un coin perdu de journal pour chômeurs. Parce que faut pas se leurrer, pas de progrès sans cobayes dans la médecine expérimentale moderne. N’ayant aucune envie de crever d’un cancer comme ma mère ou de pourrir d’un Alzheimer comme mon père, je place tous mes espoirs de longévité en bonne santé dans la science. J’avais déjà essayé de m’inscrire à de tels essais cliniques, qui sont rétribués parfois grassement, mais mon statut de fumeur bloquait le recrutement. Si je trouvais un essai pour une molécule miracle de sevrage tabagique, ce serait l’idéal.

Radios et sites Internet font leur gros titre sur un nouveau suicide chez France Telecom. Travers habituel de la surmédiatisation compassionnelle : on voudrait pousser les employés dépressifs de cette entreprise par la fenêtre que l’on ne s’y prendrait pas autrement. Vous êtes au fond du trou, vous apprenez qu’un de vos collègues a encore franchi le pas, vous vous décidez. Et vous serez demain la vedette du jour. Saute, camarade, les médias ont besoin de larmes, de fiel et de sang.

Hier, copine Peggy et moi avons posé pour copine Natacha, dans un immense entrepôt du XVIIe, une ancienne usine. Cela fait rêver, autant de place pour circuler, créer. Il fallait que je fasse des acrobaties bizarres à poil. Le pire est venu quand copine Natacha m’a demandé de m’asseoir sur une cuvette de chiotte du décor, évidemment non reliée au réseau d’eau : j’étais en phase finale de constipation, quand le cocktail Forlax-Fruits’nFibres s’apprête à faire son effet. Autant vous dire que je serrais les fesses. Depuis, mon ventre s’est vidé d’un jet. Nietzsche conseillait d’écrire avec son sang, mais vu sa liquidité, je crois que je peux écrire avec ma merde.

Qui veut devenir chasseur-cueilleur ?

Dans son opus major Mon secret minceur et santé, Maître Dukan dit que son régime se rapproche du mode de vie de nos ancêtres paléolithiques.

J’ignore ce qu’il en est pour vous, mais cet argument est assez peu vendeur pour moi : je suis positivement ravi de ne pas avoir le mode de vie des chasseurs-cueilleurs. Sans parler de leur longévité, pas fameuse malgré les vertus légendaires d'une « vie saine et naturelle » consistant à gober cinq racines et termites par jour, puis à faire beaucoup d’exercice physique en courant ou nageant comme des malades pour échapper aux lions, guépards, piranhas, crocodiles et à toutes les bestioles bouffeuses de chasseur-cueilleur dont le simple nom vous file une jaunisse.

En plus, j’imagine mal monsieur et madame Cro-Magnon s’emmerder à récolter du son d’avoine et à écrémer leur lait.

Même si je suis fraîchement converti à une certaine pureté alimentaire, j’ai quand même beaucoup de mal avec tout le tralala sur la malbouffe et la malvie modernes qui engraissent les pauvres petits humains si maigres de nature.

D’abord, une partie du surpoids et de l’obésité est dans les gènes, cela se voit sur les bancs de l’école, y’a déjà Bouboule dont tout le monde se moque à la gym et Fildefer qui passe même sous les portes des chiottes. Ensuite, c’est bien beau de pisser à la raie de l’industrie agro-alimentaire, mais elle permet à 85% des bientôt 7 milliards d’humains de ne pas crever de faim comme leurs ancêtres, et les 15% restant, ils en boufferaient bien un peu, de cette industrie. Enfin, si les gens veulent se gaver de chips goût barbecue en regardant en boucle les rediffusions de Mon Incroyable Fiancé, c’est leur problème. L’hygiénisme, cela me gonfle, on aura bientôt des flics qui mesureront notre cholestérol au réveil avant de nous enfiler des suppos oméga-3 dans le fion.

Non, vouloir un CORPS de RÊVE, c’est vraiment une affaire personnelle et en aucun cas une obligation collective, les gens ont le corps qu’ils veulent et c’est très bien ainsi.

Et puis cher Maître, je me permets de vous interpeller directement maintenant que je suis membre de plein titre de la Secte et que je communie dans le son d’avoine universel, cher Maître donc, regardez un peu le corps des derniers chasseurs-cueilleurs, a priori le plus proche de celui des ancêtres paléolithiques dont vous nous vantez la diète, regardez donc ces corps et dites-moi si ce sont des CORPS de RÊVE ?

Bah non, voyez ce que j’ai trouvé sur ce site, c’est un Piraha du Brésil.



C’est vraiment pas fameux : il a un petit bidon tout rond, des guiboles on dirait deux gressins à demi-grignotés. Et puis un short carrément absurde, une flèche disproportionnée à son arc, un chien qui ressemble à rien, il ferait d’ailleurs mieux de le manger, son chien, avec du son, au lieu de blesser un habitant du village avec son attirail pourri et sa vue basse. En plus, je suis sûr qu’il a 11 ans alors qu’il en fait déjà 45.

dimanche 27 septembre 2009

Quand Maître Allen discipline mon cerveau

Depuis trois jours, je me suis donné un nouveau Maître. Rassurez-vous, pas un concurrent de Dukan, ils ne boxent pas dans la même catégorie.

David Allen, aka Maître Allen, est un gourou de la productivité personnelle. Voilà, vous rigolez, j’en étais sûr. Vous m’imaginez déguisé en crâne d’œuf cravaté de Brother, Brother & Brother se demandant comment gérer son capital temps et en parlant à la pause café avec sa collègue Sandra. Le fait est que ce prototype forme le gros de la clientèle de Maître Allen. Mais je n’ai pas acheté, lu et mis en pratique son opus Getting things done, dont j’ai appris l’existence en lisant Wired, pour les mêmes motifs que mes congénères hantant les grandes tours de verre des multinationales.

Non, mon problème est le suivant : je suis un handicapé de l’organisation. A un point que vous ne vous représentez pas.

Inutile de vous dire «moi aussi je suis bordélique», parce que la question va au-delà dans mon cas. Par exemple, je suis déjà entré en dépression (un vrai épisode dépressif majeur) pour la seule raison que, ne voulant pas faire un travail alimentaire et étant incapable d’exprimer ce refus, je me suis coupé totalement du monde avec des bouteilles pendant 45 jours ; autre exemple, entre 2006 et 2008, j’ai soigneusement enfermé dans une malle absolument TOUS les courriers que je recevais, ne déclarant donc ni revenu, ni sécu, ni retraite ni quoi que ce soit de ces saloperies de diktats bureaucratiques ; j’ai environ quinze idées de projets (nouvelles, romans, essais, articles, peintures, photos, sites…) par jour et entre 8 et 18 h, je passe mon temps à y rêver et à en commencer certaines dans le plus grand bordel, au détriment de tâches urgentissimes qui m’attendent. Et caetera.

Tout cela va au-delà de l’organisation, d’ailleurs, cela relève sans doute de troubles cognitifs non diagnostiqués et non traités.

Mais bref, comme je viens de réussir un grand pas vers le CORPS de RÊVE en perdant 9 kg, je me suis dit que ma volonté devait désormais triompher dans tous les domaines de mon existence. Et aussi que je devais profiter de la quarantaine pour produire plus que je n’ai fait jusqu’à présent, notamment en raison de ce désordre constant dans mes affaires. Comme me le rappelait copine Sarah avant-hier, j’ai un roman à finir et je dois me bouger le cul (encore une de mes spécialités : je débute et avance pas mal sur un projet artistique, puis j’arrête, je le balance ou je le brûle, je suis un champion de l’autodafé). Et puis encore : je ne bois pas, ce qui libère le monstrueux surmoi de mon cortex frontal au maximum de ses capacités, lequel petit salaud me casse la tête à longueur de journée avec des visions récurrentes sur tout ce que je devrais faire et ne fais pas. Et puis enfin : mes chers copains du fisc, de l’Urssaf, du RSI, etc. ont fini par me retrouver et ne semblent pas apprécier autant que moi mes trois années de vacances. La vie est ainsi, les gens ne sont jamais d’accord.

Et donc Maître Allen m’a apporté la solution. Le cœur de sa méthode est assez simple, au lieu de penser vous noter, au lieu de noter des généralités (genre « faire ma série photo ») vous décomposez chaque projet ou tâche en actions élémentaires les plus simples, nécessaires pour arriver au résultat. Et quand vous avez ainsi une longue liste de micro-actions élémentaires prenant de 20 secondes à 200 minutes, ben vous les hiérarchisez et vous les accomplissez. Ca à l’air tout con, et ça l’est si vous êtes un organisateur-né, mais pour les retardés du planning comme moi, vous vous sentez bien mieux. Je ne sais pas si cela fonctionnera sur le long terme, mais le fait est qu’en 48 h, j’ai tellement mis d’ordre dans mon appartement, mes papiers, mes projets, et j’ai fait tant de petites choses toujours repoussées au lendemain, qu’il me semble ne jamais avoir été aussi organisé… de toute ma vie !

samedi 26 septembre 2009

Pharmacopée critique du CORPS de RÊVE : le Tribulus terrestris

Obsédé par mes abdominaux, ou plutôt par leur absence, je traîne sur des forums de gros bras et je tombe sur un produit censé booster ma testostérone : une plante nommée Tribulus terrestris. La pub me dit : «La réputation du Tribulus à augmenter efficacement la production de testostérone n'est plus à faire». Et moi je réponds : «OK, mais PubMed me dira si vous me prenez pour un con». Et c’est le cas.

La recherche « Tribulus + testosterone » ne donne que 11 résultats sur le moteur d’indexation, ce qui n’est déjà pas fameux du tout.

En 2008, Saudan C. et al. (Forensic Sci Int. 2008 Jun 10 ; 178(1):e7-10) ont testé le produit car des athlètes féminines avaient été contrôlées positif à la testostérone et avaient mis cela sur le dos d’une prise récente de Tribulus terrestris. Les chercheurs ont donc demandé à deux femmes volontaires d’aborber 500 mg de la plante pendant deux jours : aucun impact n’a été trouvé sur la testostérone endogène.

En 2007, Rogerson S. et al. (J Strength Cond Res. 2007 May ; 21(2):348-53) ont testé le même produit sur 22 volontaires mâles, joueurs de rugby de niveau international, pour une cure de cinq semaines à raison de 450 mg / jour. Il y avait 11 tests réels et 11 placebos. Résultat : aucune différence entre les deux groupes dans le ratio urinaire testostérone/épitestostérone. Les chercheurs sont clairs : «T. terrestris n’a pas produit le large gain de puissance ou de masse musculaire dont beaucoup des producteurs affirment qu’il peut être obtenu en 5-28 jours».

En 2005, Neychev et Mitev (J Ethnopharmacol. 2005 Oct 3 ; 101(1-3):319-23) ont testé le produit sur 21 jeunes gens en bonne santé, âgés de 20 à 36 ans, à raison de 20, 10 ou 0 (placebo) mg / kg / jour. Après quatre semaines, tous leurs androïdes se situaient dans la fourchette normale.

En 2000, Brown G.A. et al (Int J Sport Nutr Exerc Metab. 2000 Sep ; 10(3):340-59) ont fait absorber la plante au milieu d’un cocktail d’autres précurseurs supposés de la testostérone à 10 sujets jeunes mais non athlètes, pendant que 10 autres se collaient du placebo, et après huit semaines de surveillance incluant des phases d’entraînement intensif, aucune augmentation d’hormone dans le sérum, et aucune augmentation de l’adaptation à l’effort.

Ne comptez donc pas sur le Tribulus terrestris pour vous requinquer les hormones sexuelles. Le seul résultat probant semble chez Gauthaman et Ganesan (Phytomedicine. 2008 Jan ; 15(1-2):44-54), mais le test était fait chez des rats, des lapins et des primates, en intraveineuse, avec des doses allant jusqu’à 30 mg/kg.

Tous nos préjugés viennent des tripes (©FN)

L’Insee a sorti une étude sur la consommation des Français depuis 50 ans. Voilà qui nous en dit plus a priori qu’un traité de sociologie, un opus de philosophie et une thèse d’anthropologie réunis. La part relative de l’alimentation a baissé (38 à 25% du budget total), mais le budget a néanmoins augmenté en termes absolus (1470 à 2640 euros constants). Donc, on bouffe de plus en plus pour de moins en moins. Michel Duée, chef de la division conditions de vie des ménages, observe : «Les plus aisés consomment plus de fruits, de légumes et de poissons, alors que les plus modestes plus de graisses et plus de sucres». Non seulement ils sont pauvres, mais ils se rendent malades, ces cons.

Je vois aussi que les dépenses de communication, de loisir et de culture ont connu une augmentation de 10 à 16%. Malheureusement, impossible de trouver un chiffre spécifique «culture». L’Insee explique que les dépenses de téléphonie ont quintuplé, que les appareils électroniques genre magnétoscopes ou écrans plats tirent cycliquement à la hausse, mais rien sur ce que l’on peut appeler la «culture», les journaux, les livres, les disques, les films, les visites de musée, etc. Les «biens pour les loisirs» sont passés de 3,5 à 4,0, et les «services de loisirs hors tourisme» ont stagné à 1,8. Je suis peut-être pessimiste, mais j’ai l’impression que le grand tralala sur la démocratisation de la culture n’a pas produit grand chose et que le peuple a juste changé un peu la composition de son opium.

En me promenant dans les jolies rues entre le faubourg Saint-Antoine et la Seine, je pensais à la question de l’argent, je crois qu’un mendiant m’y a conduit. La liberté de pensée, c’est essentiel. Mais cela ne me suffit pas, et j’ai l’impression que l’on a gavé ma génération avec cette liberté de pensée pour faire un peu oublier sa sœur, la liberté de l’action. Parce qu’au départ, c’est cela la liberté, faire et pas seulement penser ce que l’on veut. Or de ce point de vue, certaines observations de Marx n’ont pas tellement vieilli.

Nos sociétés modernes, bourgeoises ou libérales, on les appelle comme on veut, ont dès le départ proclamé des libertés formelles de l’individu, sans que les libertés réelles soient toujours au rendez-vous. Pour une raison simple : la liberté réelle suppose les moyens de l’exercer, et ces moyens se résument désormais quasiment à un seul : l’argent. Je suis libre de faire plein de choses sur le papier, mais concrètement, je dois gagner ma vie pour les réaliser. Dans le même temps, tout coûte cher, les besoins de base comme se nourrir, se loger, se transporter absorbent déjà une part énorme des revenus (66% d’après l’Insee, les deux-tiers). Donc on doit se prostituer pour des travaux alimentaires qui nous grignotent un maximum de temps de cerveau disponible et, bien souvent, ne procurent qu’un mimum vital. Pendant que s’accumulent et s’alimentent les désirs de faire des choses hors de portée monétaire. Remarquez, y’a rien de nouveau sous le soleil, il y a toujours eu une majorité ayant nettement moins de possibilités d’expression et d’action qu’une minorité. Mais au moins, on ne faisait pas semblant, le système symbolique et matériel assignait chacun à sa caste. 

Tout cela est bien sérieux, probablement parce que je suis encore constipé – Nietzsche ne disait-il que «tous nos préjugés viennent des tripes» quelque part dans Ecce homo. Il est tard. J’espère que le yakutl du soir potientalisera Probio’Vit du matin, que les milliards de bactéries et levures déchaînées vont siphonner mon tube digestif comme un Destop.

vendredi 25 septembre 2009

Gaeng Ped

Évidemment, l’Amsterdamer était trop âcre. Donc, j’ai fini par aller vendre des disques et quelques livres, non sans avoir numérisé les premiers. Au fond, je suis pour la numérisation totale, je vais prendre l’habitude de tout numériser, mes factures, mes relevés, mes musiques, mes images, tout absolument tout.

Cela me tape sur les nerfs, en ce moment, le procès des éditeurs français contre Google. Ces incapables promettent depuis 20 ans qu’ils vont emprunter les déjà vieilles autoroutes de l’information, mais ils n’en font rien, ou alors en marche arrière, ils ont peur de la révolution numérique, ils gèrent la rareté du papier, ils cherchent des vieux médias télés et radios, ils prétendent défendre les auteurs mais à l’exception de quelques stars, ils les prolétarisent, et quand Google se pointe avec son utopie concrète – la bibliothèque numérique universelle –, eh bien ils chicanent, ils procédurent, ils couinent et ils chouinent. Minables, Français trop Français, vise-petit du trou du cul du monde. Et puis Google-le-méchant-capitaliste, quand on s’appelle La Martinière, cela me fait marrer, ce sont eux aussi des industriels qui cherchent des profits. Mais bref, je trouve que numériser tout ce qui est numérisable dans sa vie personnelle, c’est un bon réflexe. Je vais dépoussiérer mon scanner et transformer cela en automatisme.

Donc ayant du fric, je me suis payé mon premier repas de gala, et j’ai même réussi à inviter copines Peggy et Natacha. Nous étions chez Bai Thong rue de Charenton, la même famille tient Maï Thaï rue Saint-Gilles et, m’apprend Peggy, vient d’ouvrir Baan Lek rue de Jarente. Autant d’adresses que je vous conseille, c’est un peu cher par rapport à la moyenne des asiatiques mais la cuisine est excellente. Au menu hier, Phak Pad Ram Mit (légumes sautés dans une sauce huître et soja), puis le plat-fétiche Gaeng Ped (canard au curry rouge, ananas, raisins, lychees, lait de coco et piment) avec riz gluant. A table, je décompose les ingrédients pour aller plus tard chez les frères Tang, il faut absolument que je parvienne à faire cette recette.

Ce matin, début de la cure créatine, d’ailleurs en écrivant je songe que je dois soulever ma fonte deux fois par heure. J’ai aussi pris du Probio’Vit, un composé de probiotiques pour améliorer ma digestion-excrétion et de vitamines-minéraux calibrés aux AJR. En lendemain de repas de gala, je fais du tout-protéine, cela compense. D’autres fois, je ferai sans doute tout-végétarien.

La piscine reste un point noir, je n’y ai été qu’une fois cette semaine, et c’est mal barré pour cette journée, j’attends copain Jean. Il faut dire que leurs horaires hors vacances scolaires sont nuls : les sales mômes monopolisent les milieux de matinée et d’après-midi, là où les gens bossent à leur bureau et où je pourrais éviter le pénible surpeuplement des bassins. Et puis entre 11h30 et 13h30, période où c’est généralement ouvert, je suis en pleine phase de pensée et d’écriture, je n’ai pas réellement envie de m’éloigner de mon ordinateur. Je suis du genre à passer directement du lit à l’ordi, mes neurones sont en pleine forme au réveil, cela décroît ensuite lentement dans la journée. L’idéal serait piscine le soir, mais elles sont rarement ouvertes et probablement blindées par les employés rescapés de leur journée. Du coup, je me demande si je vais échapper longtemps à l’inscription en club de gym, histoire d’avoir quand même une demi-heure / trois-quarts d’heure d’activité physique un peu générale et intense. Mais le club de gym, quand même, j’ai du mal…

Oui, oui, il y a grosse (bis) – et mon corps est sa fin

Merci à ma chère lectrice, PS, qui a réagi au texte d'hier en signalant cette étude de Cora Lewis et al. Si vous aimez l’obésité abdominale, les triglycérides, la résistance à l’insuline et le risque cardiovasculaire, il existe une solution simple : faites un enfant. Si vous adorez cela, faites-en deux. Si vous êtes fanatique de cela, faites-en trois. Et ainsi de suite.

Ce sont les conclusions du suivi de 1451 femmes, dans le cadre du programme CARDIA, dont 706 étaient sans enfants trente-trois ans après le début de l’étude (1985-86), et 751 avaient connu des grossesses. Pour un enfant, le risque de syndrome métabolique (qui rassemble les symptômes énumérés ci-dessus) augmente de 33%. Pour deux, de 62%. Les autres facteurs (nutrition, activité physique) avaient été contrôlés. Bien sûr, les mêmes fonctionnaires qui nous enjoignent de manger léger et bouger beaucoup se garderont bien de signaler cela dans le cadre de la prévention du surpoids national, puisque le natalisme est chez nous religion d’Etat et que l’idée de décourager la parturiente potentielle est un crime de lèse-petit-bout-d’homme-qui-a-droit-à-la-vie.

Donc croissez, multipliez, engraissez.

Sinon je me disais ce matin dans le bus : bien des gens pensent que le sens de la vie est ailleurs. Ils ont un manque, comblé par dieu ou des concepts vides dans le même genre, des choses extérieures à la réalité, et aussi extérieures à eux-mêmes, telle cette âme sans laquelle le corps serait soi-disant vaine dépouille.

Pas moi, je suis comblé par le réel.

Raison pour laquelle le CORPS de RÊVE est une fin en soi, comme toutes les autres finalités terrestres. Ainsi j'ai retrouvé ce que rétorque le moribond sadien à son prêtre : « Créé par la nature avec des goûts très vifs, avec des passions très fortes; uniquement placé dans ce monde pour m'y livrer et pour les satisfaire, et ces effets de ma création n'étant que des nécessités relatives aux premières vues de la nature ou, si tu l'aimes mieux, que des dérivaisons essentielles à ses projets sur moi, tous en raison de ses lois, je ne me repens que de n'avoir pas assez reconnu sa toute-puissance, et mes uniques remords ne portent que sur le médiocre usage que j'ai fait des facultés (criminelles selon toi, toutes simples selon moi) qu'elle m'avait données pour la servir; je lui ai quelquefois résisté, je m'en repens. Aveuglé par l'absurdité de tes systèmes, j'ai combattu par eux toute la violence des désirs, que j'avais reçus par une inspiration bien plus divine, et je m'en repens, je n'ai moissonné que des fleurs quand je pouvais faire une ample récolte de fruits... Voilà les justes motifs de mes regrets, estime-moi assez pour ne m'en pas supposer d'autres. »

jeudi 24 septembre 2009

Dans grossesse, il y a grosse

« Coucou je m apelle Jessica je vais sur mes 23 ans j ai 3 enfants j ai deja fais dukan en debut d année », « bonjour a toutes j'ai 33ans j'ai envirn 30 kg a perdre avant mon mariages l'année prochaine j sui maman de trois nfant 7 et 4ans don des jumeaux », « bonjours a tous , je m'appelle angélique et je suis marié , trois enfants . je assistante maternelle j'ai commencer la premiére fois le régimes dukan le 10/10/2008 je peser 99 kilo et le 01/01/2009 je suis arriver a 80 kilo donc dix neuf kilo en moins »…

Vous aurez reconnu le style inimitable de mes copines les Dukanettes, proustiennes en diable quand il s’agit de narrer leur vie illustre dans la section « présentation des membres » de leur forum (on voit que c’est fait pour les filles, cela ne se fait pas de demander à un garçon de présenter son membre). Vous aurez aussi observé que ces braves dames pondent les mômes comme des lapinettes. Mais la « chair de ma chair », en langage non poétique, cela signifie dix kilos de mieux au compteur, sans compter les autres désagréments de cette maladie communément et significativement appelée la grossesse.  J’ai donc un conseil paradiététique : ligaturez-vous les trompes. Et une option régime dukannibale : mangez vos enfants.

Pharmacopée critique du CORPS de RÊVE : la créatine



Je continue donc mon passage en revue avec la créatine. C’est le fétiche des salles de muscu, le totem du quêteur de biscottos. Acide aminé non essentiel, la créatine est censée contribuer à la prise de masse musculaire au détriment de la masse graisseuse. Pour la petite histoire, elle a été découverte en 1832 par un chimiste français, Michel Chevreul, à qui l’on doit aussi la margarine et la saponification.

La créatine a commencé à se répandre au milieu des années 1990 comme complément de l’effort musculaire. Les deux méta-analyses les plus récentes que je trouve sur PubMd datent de 2003 : Nissen SL, Sharp RL. (J Appl Physiol. 2003 Feb;94(2):651-9) et Branch JD. (Int J Sport Nutr Exerc Metab. 2003 Jun;13(2):198-226). La seconde rassemble plus de 100 études menées dans des conditions correctes du point de vue de leur significativité (groupe témoin, placebo, double aveugle, etc.). L’une et l’autre concluent que la créatine a un effet positif sur la masse musculaire. Elle est inutile pour les sports d’endurance (genre course ou natation), mais produit ses effets dans les efforts intenses comme les haltères, efforts d’une durée inférieure ou égale à 30 secondes (on appelle cela des exercices de résistance isométrique, isocinétique et isotonique, si vous voulez crâner dans le vestiaire). La créatine augmente notamment la rétention d’eau dans les muscles, il faut donc boire beaucoup. Cela tombe mal, j’ai un mal de chien à absorber de l’H2O.

Copain Stéphane m’avait dit qu’un ami à lui s’était plaint d’un violent mal aux couilles après la prise de créatine, mais je n’ai rien trouvé là-dessus dans les effets secondaires. Soit c’est une légende urbaine, soit la douleur testiculaire était sans lien, soit il s’agit d’une réaction très singulière et rare dans la population. Je vous donnerai des nouvelles de mes gonades. A part une contre-indication pour des troubles rénaux, les effets secondaires sont rares, du genre diarrhées, nausées ou crampes chez certains sujets. Côté dose, il semble que 3 grammes par jour, en plusieurs prises et avant l’effort, est un optimum. Le régime d’attaque à 20 grammes préconisés par certains n’aurait pas d’effets notables, mais c’est discuté.

Si elle profite aux muscles, la créatine ne baisse pas le poids global (elle tend même à l’augmenter chez l’homme en raison du gonflement des biscottos) et en l’absence d’activité physique un peu intense, elle vous fera gonfler tout court. De même, passé un certain degré de saturation dans les muscles, la créatine n’aurait plus d’effet sur ceux-ci. Mais bon, je n’en suis pas là.

Bilan : j’inclue copine créatine dans mon régime quotidien. Comme les viandes en contiennent naturellement, je n’en prends pas ou j’en prends moins dans les jours PP de mon régime de stabilisation. Et j’évite bien sûr d’en prendre les journées où je ne peux pas faire d’efforts intenses.

Les équations de la stabilisation

Pas une flèche jusqu’à vendredi, où je verrai copain Jean. Journées survie, je dois terminer les maigres restes comestibles, finir le paquet d’Amsterdamer, un tabac que je n’apprécie guère. Et retarder mon premier « repas de gala », que je compte prendre au restaurant Maï Thaï dont je rêve depuis un mois. Du coup, j’ai mis mes dernières pièces dans un riz complet bio, bien que j’aie l’impression qu’il contribue à ma constipation au lieu de la conjurer. Mais là, je suis réduit à l’aliment de base de la moitié de l’humanité.

Je pourrais encore vendre des livres à Gibert, mais d’abord j’en ai plein le cul de faire disparaître ainsi ma bibliothèque et ensuite j’ai de moins en moins de livres vendables, je me fusille la colonne vertébrale avec des sacs à dos énormes que je ramène quasi-pleins. Pareil pour les disques, j’ai commencé à regret à liquider mes classiques et en plus, j’ai la flemme de les copier avant sur iTune. Bon, je vais fouiller quand même, l’Amsterdamer est vraiment âcre…

Sinon, je réfléchis à mon régime de stabilisation. Dont voici les équations.

1. Codifier au maximum et organiser par journées cohérentes. Dans la phase d’attaque du régime Dukan, j’aimais les ordres clairs du Maître, ne manger que des protéines ce n’est pas dur à comprendre et appliquer. Je sais d’avance que je serai incapable de suivre une espèce de régime merdique où l’on doit manger un peu de tout mais en minuscule quantité, sérieux comme un petit vieux qui surveille sa tension et son cholestérol. Non, il faut que je fixe un type précis de nutrition par jour (tout protéine, tout légume, mixte, gala…) et que je t’y tienne. De même pour les phases de la journée, mais cela c’est simple : du réveil au soir, je maintiens la galette Dukan et une quelconque protéine si j’ai faim, je ne fais un vrai repas que le soir.

2. Fixer les interdits et augmenter les repas de gala. Deux repas de gala, c’est trop peu, je sais que dès que j’aurai du blé, j’irai au restaurant parce que j’aime cela, et je sais aussi que j’arrêterai d’emmerder mes amis avec des régimes spéciaux en soirée. Donc je fixe à trois le nombre de repas de gala hebdomadaires, tant pis pour la règle fixée par Dukan (ô Maître pardonnez mon offense). En revanche et en compensation, je vais continuer certains interdits : aucun sucre rapide (donc pas de dessert au repas de gala et pas de pain au chocolat le matin), aucun alcool. Et un strict minimum de glucides lents genre pâtes ou frites, donc jamais plus d’un repas de gala genre MacDo ou kebab, si possible aucun (j’aime assez les nourritures asiatiques, elles sont relativement diététiques si l’on choisit bien ses plats, cela m’ira bien comme repas de gala majoritaires).

3. Surveiller le yo-yo (et particulièrement le ventre maudit où est né le gras immonde). Il paraît clair qu’à la vitesse où j’ai perdu, et avec la rigueur du régime, mes cellules vont se jeter sur le moindre sucre ou la moindre graisse ou la moindre association fatale lipide-glucide comme la faim sur le pauvre monde. La surveillance quotidienne avec la balance est plus que jamais une obligation, ainsi que l’augmentation de la dépense énergétique. En passant de 66 à 68 kg, je dois récupérer de l’enveloppe (musculaire) sur les bras, les jambes, les fesses, le dos et le torse, mais continuer à en perdre sur le ventre. Là cela va être chaud, les abdos me font un mal de chien et me déplaisent fondamentalement comme exercice physique, c’est une horrible torture à laquelle je répugne.

4. Devenir le cobaye volontaire de l’industrie du complément alimentaire. Je n’ai aucun goût pour les pleurnicheries sur la « vie saine pure et naturelle » et aucune prévention contre les pilules – au contraire, j’adore en acheter pour les tester. Donc, je vais multiplier les expérimentations dans certains axes : assurer la dose journalière recommandée de vitamine et minéraux ; rétablir par probiotiques et autres mon transit jusqu’à un juste milieu entre constipation et diarrhée ; développer mes muscles, particulièrement abdominaux, par tous les moyens possibles ; tester les différents antigraisses autour des repas de gala.

mercredi 23 septembre 2009

Angot, bulot, dodo

Comme j’ai un an de retard sur les rentrées littéraires, je viens seulement d’achever Le marché des amants de Christine Angot. Un des protagonistes appelle « bassin parisien » le ventre mou de l’habitant moyen de la Capitale, c’est pas mal trouvé. On dit pis que pendre de l’autofiction (facile, plate, nombrilesque, égocentrée, sans imagination, etc.) mais moi j’aime assez comme genre, c’est délassant, et puis cela flatte toujours un peu nos instincts de voyeur, hein, faut pas se le cacher. Ceux qui critiquent l’autofiction imaginent que c’est facile à produire, mais je n’en crois rien, d’abord ce n’est pas si facile de parler de soi, ensuite le style est travaillé, comme pour toute fiction. Je me demande tout de même comment on peut être maqué à Christine Angot : jamais vu une fille aussi dénuée d’humour, elle prend absolument tout au sérieux et elle a l’air chiante comme la pluie. Je crois que je préfère encore Delaume la déjantée. En plus, la sodomie lui pose des problèmes métaphysiques, à Angot. Je me marrais plus en lisant Dustan (oui Dustan, pas Dukan).

J’ai appris hier que j’étais « code 40 » à la banque. En gros, cela veut dire tricard de chez tricard. Il faut dire que depuis vingt ans, j’ai planté pas mal de banques, que ce soit en compte personnel ou professionnel, en chèque sans provision ou en crédit non remboursé. Je ne suis absolument pas adapté à l’argent, je le claque au jour le jour, le plus vite possible, c’est quasi-compulsif. En même temps, comme les pouvoirs en place nous disent que le bon citoyen est aussi le gros consommateur, je devrais être décoré au lieu d’être puni, je suis un pilier de la croissance hexagonale. Dans mon cerveau, il y a un truc qui m’empêche de planifier à long terme, disons quelques mois à quelques années d’avance, parfois quelques jours ou quelques heures.

Hier, j’ai aussi été chez le poissonnier de la rue de Bretagne. Les crevettes roses à 15 euros le kg (rebaptisés 1,50 euros les 100 g, cela trompe le chaland) n’étaient pas plus goûtues que celles à 12 euros du Franprix. Et les bulots étaient mi-frais, terrible parce que cela ne pardonne pas, le bulot avarié, comme à la base c’est déjà gros et caoutchouteux, une parfaite fraîcheur et un petit goût poivré de cuisson récente sont indispensables. Du coup, j’en ai balancé la moitié. La mayonnaise Dukan, qui accompagnait ces mets moyens, est un pilier de mes phases protéiques, elle est simple à faire (un jaune d’œuf, une cuillerée de moutarde, deux cuillerées de faisselle ou fromage blanc, un peu d’herbes si l’on veut), pas si mauvaise, et indispensable pour satisfaire le réflexe préDukan de la sauce.

Ma rue est petite et j’habite au deuxième, aussi j’entends les discussions des gens qui passent, surtout en soirée, ils parlent fort, ils ont bu et ils élèvent la voix, parfois ils crient dans leur mobile. Ils feraient mieux de la fermer, les gens, parce que ce qui sort de leur bouche ne mérite pas d’atteindre mes oreilles, et puis je suppose qu’ils émettraient moins de CO2, faudrait taxer les bavards-braillards qui prennent les rues à témoin. Enfin, ma chambre est côté cour, je dors bien.

mardi 22 septembre 2009

La philosophie dans le séchoir

Heidegger s’est trompé, je crois. L’orientation destinale de l’existence humaine comme Dasein n’est pas l’être-pour-la-mort,  et l’angoisse. Mais plutôt l’être-pour-le-Beef-Jerky, et la joie.  Les penseurs des temps nouveaux doivent également réfléchir au concept de BBQ Steak Bar comme dévoilement de la vérité de l’être (aletheia). Telle est ma méditation vespérale, en compagnie de Joe et Ken.


Un mois sous le régime du Maître : bilan provisoire

65,6 kg à 17:00. Hier j’étais à 66,3 kg. Je peux raisonnablement considérer que mon objectif de 66 kg est aujourd’hui atteint. 23 août-22 septembre : par la grâce de Maître Dukan, il m’aura fallu 30 jours pour perdre 9 kg. Je suis content, même si je n’ai pas tout à fait échappé à l’effet PMG, que mes bras et mes cuisses ont un peu trop maigri, et que la poche ventrale quoique joliment diminuée résiste encore. Mais j’entre justement dans la seconde phase, celle de façonnage du CORPS de RÊVE.

Quel bilan tirer de ce mois écoulé ?

Et d’un, le régime Dukan est efficace. Le principal effet secondaire dans mon cas est une dérégulation du transit. Mais rien d’autre a priori. La perte de poids a été régulière, sensible dès la première semaine, continue ensuite, à raison d’environ 1,6 kg par semaine. Je suppose que le respect scrupuleux de la ligne diététique est une condition de cette réussite, et ce fut mon cas : pas une sucrerie, pas un féculent, pas un morceau de pain (hors pain Dukan), pas une goutte d’alcool, et pas une entorse à l’alternance PP-PL (protéines pures / protéines légumes) tous les cinq jours. De surcroît, j’ai commencé l’exercice physique qui a probablement brûlé des calories.

Et de deux, le régime Dukan est difficile. J’avais pour moi un certain nombre d’atouts (fumeur, désintérêt tendanciel pour la « bonne bouffe », peu de goût pour le sucré, sauf sucré-salé en plat, maigreur originelle de mon organisme) que d’autres n’ont pas. J’imagine qu’un gourmand replet depuis l’adolescence souffrira bien plus d’un respect strict du régime Dukan, notamment d’une certaine monotonie et d’inévitables fringales que j’ai également ressenties, surtout le soir.

Et de trois, le régime Dukan est coûteux (un peu). Il se trouve que j’ai réduit la cigarette et supprimé le vin, ce qui a fait pas mal d’économies au jour le jour, de même que la fin provisoire des restaus où j’adore me rendre d’habitude. Mais les phases protéiques sont assez chères, surtout si l’on veut varier, car les viandes, poissons ou crustacés de qualité ne sont pas donnés. Et je ne parle pas de l’option bio, dont les tarifs sont évidemment sans commune mesure avec le hard discount.

Et de quatre, le régime Dukan est solitaire (idéalement). Quand j’ai la garde de mes enfants ou quand j’accepte des invitations chez des amis, il est particulièrement difficile de tenir le cap. Encore ai-je des amis formidables qui s’adaptent à mon régime, et une vie familiale sans aucun formalisme où chacun fait un peu ce qu’il veut. Mais j’imagine la ménagère de moins de cinquante ans qui tente un régime avec trois gosses à la maison, un ticket restau tous les midis et une fiesta tous les week-ends, je me dis qu’elle est mal barrée.

Et de cinq, le régime Dukan est chronovore. Parce qu’il faut bien essayer de varier les plaisirs, et notamment d’aménager le double dogme du protéique pur et du son d’avoine, deux sortes de mets pas très excitant a priori (bien que le maître nous assure dans sa Bible que l’on peut faire des « pizzas », « hamburger », etc. mais bon faut pas pousser, vous n’aurez jamais un délicieux Big Mac Dukan à l’arrivée). J’ai passé un temps incroyable à faire mes courses, à préparer des plats, à faire ma vaisselle. Plutôt agréable d’ailleurs, car c’était nouveau et je suis curieux. D’ailleurs, voyez ce magnifique pain, preuve en image que l’on peut progresser en grade dans la gastronomie dukanienne.



N'invitez plus de maigres à table

Je lis une étude de Brent McFerran et ses collègues, qui vient de s’intéresser à l’influence des personnes partageant nos repas. 210 étudiants ont accepté de déjeuner avec un autre étudiant dans le cadre d’une expérience dont ils ignoraient le but réel. Leur compagnon de table de circonstance était en fait un membre de l’équipe de recherche. Celui-ci était mince, mais dans la moitié des cas, il était affublé d’une prothèse le faisant paraître obèse. Résultat : dans tous les cas, les étudiants cobayes ont été influencés par la quantité de nourriture choisie par leur vis-à-vis à table ; cette influence était d’autant plus forte que le convive était mince. Donc, quand vous voyez votre meilleur(e) et maigre ami(e) s’empiffrer en face de vous, eh bien souvenez-vous qu’il ne faut pas suivre son exemple. Et ne l'invitez plus jamais. (Journal of Consumer Research, en ligne 25 août 2009, doi : 10.1086/644611)

lundi 21 septembre 2009

Post scriptum post-soviétique

Cela me vient en pensant au message précédent : croyez surtout pas que je suis fasciné par le style lisse et propre des médias mode, des médias en général. Tenez, ces deux-là n’ont pas vraiment un CORPS de RÊVE, eh bien cela ne me dérange pas, au contraire. Je possède d’ailleurs quasiment le même caleçon que le type sur la photo.



Le photographe s’appelle Mikhailov, un ex-Soviétique désenchanté de longue date dont j’aime beaucoup le travail. «Je n’essaie pas de prendre des photos de choses exceptionnelles, mais  plutôt plein de choses qui sont en excès». (Boris Mikhailov, série Case History, 1999, © Saatchi Gallery).

Quarante et un

Aujourd’hui j’ai 41 ans. Je ne fête pas plus cet anniversaire que les 21 précédents, ma journée passera paisiblement sous le signe de la protéine pure. Étrange manie que de comptabiliser ainsi ses années, et qui plus est de fêter en grandes pompes chaque coulée supplémentaire dans le sablier. À la rigueur, je comprends la dimension utilitaire : c’est agréable de recevoir plein de cadeaux, j’en fais volontiers aux autres s’ils aiment souffler leurs bougies. Moi, je préférerais oublier mon âge, ne pas connaître ma date exacte de naissance, comme c’était souvent le cas jadis.

Curieusement, j’ai mal pris l’entrée dans ma quarantième année, alors que ce chiffre n’a aucun sens en soi (40 est le moment d’une suite numérique n’étant pas marqué par des symptômes particuliers, l’attention au « chiffre rond » est purement culturelle). À dire vrai, cette quarantième année arrivait dans un processus débuté plus tôt, sans doute vers 37-38 ans : les nuits blanches devenaient difficiles et les lendemains de cuite également, les bronches s’essoufflaient d’un seul coup, le travail alimentaire s’imposait comme la réalité d’un esclavage à vie, l’énergie se faisait rare pour sortir du chemin tracé par la pression sociale et surtout économique…

Mais puisqu’à 41 ans, je viens de retrouver mon poids d’il y a quinze ans, je suppose que plein d’autres choses sont ainsi réversibles dans les manifestations de la flèche du temps, au plan physiologique et psychologique (lesquels ne font qu’un ou presque, d’ailleurs).

Sinon, je lis sur le site du Figaro qu’une députée UMP a déposé un projet de loi visant à rendre obligatoire la mention « photo retouchée » sur chaque cliché modifié par un logiciel informatique. «Objectif : lutter contre une vision irréelle de la femme - véhiculée par les magazines de mode et la publicité -, qui peut avoir une influence néfaste, en particulier sur les adolescentes. » Un petit coup de la vieille Sharon pour comprendre l’enjeu.



Voilà bien le genre d’initiative qui m’exaspère. D’abord parce que les députés pratiquent en France l’inflation législative et qu’ils semblent toujours chercher des idées nouvelles pour étendre à l’infini l’ensemble des pratiques tombant sous le coup de la loi. Ensuite parce que sauf sous certains régimes totalitaires, l’humain ne donne pas nécessairement une vision « réelle » ou « réaliste » de lui-même, de la nature en général. Enfin parce que l’argument de la pauvre petite adolescente qui devient anorexique à cause des méchants publicitaires est grotesque de simplisme, et qu'en tout état de cause, la mention de la retouche dans un coin ne changera rien à la fascination exercée par les people sur la plèbe.

dimanche 20 septembre 2009

En passant par la rue Tiquetonne

Je me suis déjà déplacé deux fois chez G. Detout, rue Tiquetonne dans le IIe, un épicier réputé pour avoir de tout, comme son nom l’indique, et à des prix pas chers. Ben c’est faux, dans mon cas il aurait mieux fait de s’appeler G. Derien : ni arôme de beurre, ni arôme de pain brûlé. En plus, la boutique est souvent bondée des bobos du quartier, les tenanciers ont un style vieux-cons-fiers-d’eux-mêmes qui me gave, les prix ne sont pas si bas que cela. Donc je boycotte et je le fais savoir.

Mais j’ai fait deux rencontres agréables dans la même rue Tiquetonne : au numéro 9, une friperie avec des fringues assez originales pour hommes, ce qui est finalement assez rare sur Paris pour être signalé (achat d’un pantalon sky à motif serpent, de taille 40 c’est vous dire si je suis optimiste sur la suite de mon régime) ; au numéro 30, l’épicerie de Bruno, un gars fort sympathique spécialisé dans les épices de France et du monde (achat de chimichurri pimenté, mélange argentin traditionnel pour accompagner les viandes, et de mariguette, graines ivoiriennes proches du poivre).

Pharmacopée critique du CORPS de RÊVE : les CLA

Je commence à préparer ma pharmacopée spéciale CORPS de RÊVE, en vue de ma phase de stabilisation entre 66 et 68 kg. Les objectifs : empêcher l’effet yo-yo, liquider les graisses rebelles, accroître la masse musculaire, exterminer le volume ventral, réguler le transit (je n’ai jamais retrouvé mon rythme pluriquotidien d’évacuation). Et puis, comme je compte aménager à ma manière le régime Dukan en phase de stabilisation, j’ai intérêt à préparer mes arrières.

Je n’entends pas prendre n’importe quoi, je vérifie sur PubMed ce qui est dit des produits proposés pour les régimes minceur et fitness. PubMed, c’est la référence des publications scientifiques dans le domaine biomédical. Si vous êtes anglophone, ce n’est pas compliqué de se faire une idée sur un produit. Le mieux est de trouver les « méta-analyses » (analyse de l’ensemble des travaux publiés précédemment) et les « review » (synthèse de la littérature existante).

On débute cette série par une boite de gélules que copine Peggy m’a filée : les CLA.

Les CLA (acides linoléïques conjugués) ont la réputation de diminuer la masse graisseuse tout en préservant le tonus musculaire. Mais les chercheurs ont un discours bien moins optimiste que les vendeurs. En 2004 déjà, AH Terpstra (Am J Clin Nutr. 2004 Mar;79(3):352-61) n’a pas trouvé d’effets notables sur les lipides du plasma : cela marche bien sur les rongeurs, mais moins bien et même bien moins sur les Homo sapiens. Même scepticisme deux ans plus tard chez J. Salas-Salvado et al. (Crit Rev Food Sci Nutr. 2006;46(6):479-88), qui demandent plus d’études sur le sujet humain pour se faire une opinion. En 2007, le passage en revue de M.B. Silveira et al. (Public Health Nutr. 2007 Oct;10) n’est pas plus concluant. Le seul article un peu favorable est la méta-analyse récente de L.D. Whigham et al. (Am J Clin Nutr. 2007 May;85(5):1203-11), qui observe un effet légèrement supérieur au placebo, avec une perte de gras de 24 grammes / gramme de CLA / semaine de traitement. Pas fameux quand même, pour perdre 500 g de graisse à raison de 3 g de CLA par jour (la dose conseillée), il faut environ six semaines, soit 250 gélules.

Bon, comme j’ai la boite je vais en prendre, mais ce n’est pas le top. En même temps, la plupart des études se font sur le sujet obèse et chaque organisme est différent. Si toutefois vous en prenez depuis un certain temps sans observer d’effets notables, je vous conseille d’abandonner et d’essayer un autre produit, vu l’état de la littérature scientifique.

samedi 19 septembre 2009

Annonce immobilière

300 grammes. C’est ce qui me sépare aujourd’hui de l’objectif de 66 kg. Demain dimanche, je commence une phase protéines pures qui va me stabiliser un peu en dessous du but. Ensuite, donc à partir de jeudi, je commence la fameuse phase de stabilisation, en l’occurrence avec de la marge de rebond puisque je vise 68 kg comme poids moyen de long terme.

Hier, copine Natacha me faisait passer sous le nez avec un rire sadique de délicieuses tartes aux légumes et un carré d’agneau à rendre carnivore le plus fanatique des végétariens. Mais rien de cela n’a entamé ma détermination à grignoter des légumes vapeur, au demeurant très bons en dehors de petits navets trop acides, et à la fin du repas, ce sont mes chers hôtes qui regrettaient d’avoir bien trop mangé. J’offre à copain Stéphane un Borkum Riff miel-orange, il me sort de son côté… un paquet de Beef Jerky néozélandais déniché au Bon Marché ! Je saute de joie, le seul défaut de l’amuse-gueule si regretté depuis l’Estonie étant qu’il y a du sucre dans sa composition, et seulement 25 grammes dans un paquet. J’espère que ce n’est pas vendu plus d’un ou deux euros, car cela se grignote en trente secondes.

Copain Stéphane me dit en souriant qu’il ne fait pas du tout la compétition musculaire avec moi, je n’en crois absolument pas un mot et je note de renforcer mes doses de Pure Whey. De toute façon, avec la stabilisation qui arrive, je vais déchaîner toutes les ressources planétaires du complément alimentaire visant à brûler les graisses, renforcer les muscles, accélérer le transit et aplatir le ventre. A mon humble avis, copain Stéphane n’a pas la plus petite chance d’atteindre mon taux de masse musculaire à venir – s’il me lit, je lui dis en toute amitié d’arrêter net ce combat perdu d’avance et d’aller plutôt chez MacDo profiter de la vie.

Brocante du IIe arrondissement ce matin, copine Peggy m’a négocié à 10 euros un lapin naturalisé dont je trancherai la tête un de ces jours. Elle aime bien négocier, moi je déteste cela, le rapport de force me paraît vain. Sauf que diviser un prix par deux, ce n’est pas si mal à l’arrivée. Monde fou dans Paris avec le temps agréable et la TechnoParade – on la croise à hauteur du boulevard Saint-Michel, de jeunes gens se trémoussent sur des camions et s’agglutinent autour, je n’en nourris aucune opinion, juste une fascination inquiète pour la puissance attractive de tels mouvements tribaux, qui me rappellent parfois des sortes documentaires animaliers, comme si le fait d’être encore humain était assez secondaire par rapport à la horde en mouvement. La foule devient trop dense sur les trottoirs, Peggy et moi nous enfuyons vers nos appartements respectifs.

J’ai vécu à Paris, en banlieue et à la campagne, donc en dehors de la grande ou moyenne ville de Province, je connais par expérience la plupart des milieux de vie disponibles dans notre pays. Commençons par le plus simple : oublier la banlieue, c’est un tas de merde. Au mieux on a assez d’argent pour avoir une très belle baraque indépendante dans une banlieue chic. Au pire, et le pire est la norme banlieusarde, c’est un mélange des défauts parisiens et provinciaux, un alignement de petites maisons disjointes, de grosses barres pourries, de jardinets médiocres, de magasins minables, de ZAC déprimantes. D’ailleurs banlieue signifie le lieu du bannissement, un bagne dont la dureté se voit sur les visages fatigués des gens qui se tapent quotidiennement le RER malodorant ou les trois heures de bouchon. Dans notre pays hypercentralisé, Paris est évidemment incontournable pour la vie intellectuelle, artistique et culturelle, pour la mode, pour la disponibilité de tout partout et presque à toute heure (enfin, des progrès à faire entre 2 et 6 heures du mat’ pour les insomniaques), pour la beauté de son architecture dont on profite idéalement la nuit. Mais Paris est archiplein de têtes de con qui m’indisposent, je ne suis pas sensible à certains de ses atouts (la fête, la « sortie » en général), et surtout, surtout, je manque horriblement d’espace, de perspective (au sens visuel), de liberté d’action immédiate. La campagne est nettement mieux pourvue sur ces derniers points, car la place est peu coûteuse, mais elle devient vite pénible à vivre à plein temps, surtout en hiver où les jours ne se lèvent pas plus que la boue ne sèche – et puis les ruraux sont assez souvent des attardés mentaux qui vous regardent fixement passer devant eux, que vous soyez à pied, en vélo ou en bagnole, vous avez l’impression d’être un Martien.

Bref l’un d’ans l’autre, mon idéal est une alternance 4 jours campagne et 3 jours Paris, en moyenne parce que je peux aussi avoir envie d’être 8 jours de suite à la cambrousse ou dans la Capitale. J’ai déjà le pied-à-terre parisien, mais pas du tout les moyens pour louer ou acheter à la campagne, surtout à 200 km de Paris. C’est néanmoins mon but à terme, et si d’ailleurs vous avez une baraque très isolée dans un coin très paumé avec un très grand terrain et tout cela à deux heures maxi de la Capitale, ben faites-moi signe.

vendredi 18 septembre 2009

Hikikomori au bord d'un canal

Malgré le quart d’heure de retard par rapport à l’ouverture, la piscine Parmentier est raisonnablement vide. Je trace mes 500 mètres en ne prenant que trois courtes pauses alors que voici quatre semaines, je m’arrêtais tous les 25 mètres pour souffler comme un phoque ayant sprinté face à trois orques. Un peu d’entraînement, un changement de sexe, et hop, je pourrai remplacer l’ex championne olympique et jeune retraitée Laure Manadou.

Parmentier me plaît bien, surtout que j’ai modifié mon trajet piéton pour m’y rendre. Avant, je passais par la rue du Faubourg du Temple, sordide ramassis de vendeurs de kebabs gras, de fringues pourries et de bibelots médiocres. Maintenant, je passe par des petites rues, franchis le canal Saint-Martin dont le cours figé me plaît, passe devant la façade vétuste de l’hôpital Saint-Louis où j’aimerais bien faire quelques photos.

En plus, j’ai un nouvel ami pas loin à compter de ce jour : A la Pipe du Nord, au 21 du boulevard Magenta. Vaste choix de matières, de couleurs et de formes. Le patron du lieu sait conseiller sans s’imposer. J’apprends que si j’ai du mal à tirer, c’est parce que mes tabacs sont trop humides : deux heures de séchage après l’achat devraient suffire à obtenir une combustion optimale. Hier, copine Peggy regrettait que je sois venu sans pipe, l’odeur de fumée étant meilleure que celle de la clope. Mais j’avais mon Manhattan Portage petit format, pas pratique pour le barda (pipe, cure-pipe, blague à tabac, allumettes). Je m’achète donc chez mon nouvel ami une pipe de petites dimensions, courbes, aux jolis reflets magenta sombre. Joe l’apprécie d’emblée, comme on peut le constater.



La pipe me paraît vraiment la voie royale pour mon sevrage tabagique, du moins la forte réduction de ma consommation. En plus, l’objet est beau, ou du moins peut l’être, plus original que l’universelle clope, le tabac est plus doux aux papilles et aux narines. Je ne dois pas précipiter les choses, mais je note dans un coin de ma cervelle de fixer l’objectif zéro cigarette.

Avant-hier, copain Pierre-Henri parlait du syndrome hikikomori, et cela me revient en tête en longeant le canal Saint-Martin. Ce sont des Japonais qui vivent reclus, se coupant progressivement de tout contact social, parfois enfermés dans des placards, communiquant entre eux par mails ou textos. Ils ne présentent par ailleurs aucun symptôme pathologique de type anxieux, dépressif ou psychotique (autisme, schizophrénie). PH est intrigué par le « particularisme » supposé de ce trouble, il voudrait monter un groupe de travail franco-nippon là-dessus et se demande si le refus de l’école par les enfants français, plus répandu qu’on le croit d’après les chiffres du CNED, ne serait pas un syndrome apparenté. Cette diversité de l’esprit humain me fascine, et en l’occurrence, je comprends très bien les hikikomori. Se retirer de la société, voilà bien un premier pas vers la lucidité. Au Japon, ils ne sont pas du tout fustigés, juste perçus comme un groupe ayant ses mœurs particulières. En France, on n’aurait pas la même mansuétude à mon humble avis, on dépêcherait des armées de travailleurs sociaux pour essayer d’intégrer ces individus ayant la folie de refuser l’amour obligatoire de leurs semblables.

Quand j’aurai mon CORPS de RÊVE, je me promènerai nu dans des forêts désertes.

jeudi 17 septembre 2009

L'Espagne, ses scarabées, ses lesbiennes...

Dîner hier chez copain Pierre-Henri et copine Sarah : adorable, cette dernière m’a fait un régime spécial que je grignote en observant (presque) sans arrière-pensée l’appétissante nourriture indienne au menu non-dukanien, après avoir bu (presque) sans regret une Badoit en lieu et place du champagne apéritif. La conversation roule sur toute sorte de sujets effarants – depuis les scarabées espagnols nichant dans les oreilles des psychanalystes français jusqu’aux collectifs lesbiens overcokés brandissant des godemichés sous le nez des visiteurs de musée, là encore outre-pyrénéens (j’en déduis in petto qu’en Espagne, il faut désormais serrer les fesses aux musées et fermer les oreilles à l’hôtel).

Outre copine Peggy et moi-même, il y a copine Catherine qui n’a absolument pas besoin d’un régime car elle est mince comme un fil, et copine Florence qui est presque aussi svelte mais qui, par le plus grand des hasards, se tâte pour commencer un régime Dukan. Le Maître lève une impressionnante armée de disciples, l’autre jour j’entendais encore deux filles dans le bus en parler, enfin je suppose qu’elles en parlaient car lune disait à l’autre « non mais à volonté, tu vois, t’en manges autant que tu veux », et l’autre un peu sceptique objectait : « ben oui mais… des steaks… à volonté… ».

Déplacement presque toute la journée, je rentre en fin d’après-midi avec le désagréable manque des mouvements de musculation qui rythment normalement chaque heure passée à l’appartement. Je n’ai décidément pas envie de concentrer mes efforts en une heure de gym quotidienne, je préfère 20 petites pauses de 5 minutes. Dans le train, j’ai lu La Tribune histoire de me motiver pour le cas où j’aurais des clients malgré la criiiiise. Ben j’ai rien retenu, les journaux économiques m’ennuient globalement, avec leur valse de chiffres qui n’auront plus aucun sens dans deux jours, deux semaines ou deux mois. Ah si quand même, il y avait un édito sur la grippe A H1N1. Le signataire affecte 5% de probabilité à un scénario noir de noir, mutation du virus et/ou combinaison avec le virus saisonnier , résistance aux antiviraux, mortalité forte, dislocation complète et simultanée de l’économie de l’hémisphère Nord, replongée dans la crise, intervention de dernière chance des États au bord de la faillite… Je me demande pourquoi ce scénario a 5% de chance de survenir, et non pas 0,5 ou 50. A mon avis, ce chiffrage est du pur pifomètre.

J’avais décidé de m’acheter du noir pour cet automne, mais je craque sur un sweat American Apparel d’un mauve intense. Curieusement, quand j’étais replet, je ne portais jamais de noir alors que cela m’aurait amaigri. Et maintenant que je mincis, j’abandonne la couleur. Enfin, pour une saison ou deux, je doute que le prochain printemps n’éveille chez moi l’appel des teintes éclatantes. 

mercredi 16 septembre 2009

Arôme de beurre (sans beurre ni arôme)

Pfff, sur le côté de cette page, je vois une publicité ciblée sur les Dukaniens (enfin « Dukaaniens », ces épiciers ne sont pas foutus d’écrire sans écorcher le seul nom propre de leur accroche) et promettant un arôme de beurre sans beurre. Ce qui peut être intéressant ma foi, j’avais cherché sans succès un arôme de pain brûlé quand ma baguette me manquait trop. Mais quand je clique sur le lien publicitaire, on me dit que le produit n’est pas disponible. C’est donc finalement un arôme de beurre sans beurre ni arôme, un peu comme le couteau sans lame qui n’aurait pas de manche des surréalistes. 

Le mince comme volonté et comme représentation

67,0 : ce sont les chiffres qui apparaissent ce matin sur l’écran de copine Terraillon. A ce rythme, je devrais atteindre mon objectif de 66 kg après un mois tout rond de régime. Serais-je croyant que j’irais brûler deux cierges au Maître. Mais je suis mécréant, et je brûlerai seulement deux kreteks – des cigarettes indonésiennes au clou de girofle, que l’on trouve au tabac de l’Odéon sous la marque Djarum.

Je suis très surpris par la facilité avec laquelle j’ai fondu. Les premiers jours furent certes difficiles, et ce journal en porte les traces, mais le rythme de croisière s’est imposé assez rapidement. Des régimes minceur, je connaissais la réputation de calvaire : ce n’est pas ainsi que je le vis.

Il faut dire que je suis un maigre de nature. Cela ne veut peut-être pas dire grand chose, mais quand même : de la naissance à 20-25 ans, j’étais maigre comme un clou. Et à l’instar de beaucoup d’hommes, l’embonpoint m’a fondu dessus au cours de la trentaine. Reste que malgré une enfance et une adolescence placées sous le signe de la malbouffe intégrale, je ne prenais rien de rien et je traînais ma carcasse aux angles aigus. Je suppose qu’il y a là des raisons métaboliques innées, certes capables de se dérégler avec le vieillissement, mais donnant quand même une bonne base par rapport à ceux qui prennent inexorablement 500 grammes en grignotant deux barres de céréales. La vie est injuste, mais ça on le savait.

Un autre facteur est probablement mon sexe – pas mon pénis, non, mon genre, mâle. Encore une affaire d’hormones : puberté, grossesse et ménopause sont des étapes souvent délétères pour la silhouette féminine, qui possède à la base une moindre masse musculaire. On connaît depuis la préhistoire des Vénus callipyge, mais pas d’Apollon fessu, ventru et cuissu. Que la fécondité rime parfois avec obésité devrait faire réfléchir les poules pondeuses dont les poussettes piaillardes polluent mes paisibles promenades.

Et puis une autre cause de ma fonte régulière et rapide, c’est tout de même la victoire de la volonté tendue vers le CORPS de RÊVE. Un changement radical du mode de vie, et pas une faiblesse : je ne suis pas mécontent de tous les petits efforts pour réprimer la faim et l’envie – aujourd'hui encore, je trainais à l'épicerie du Bon Marché sans prêter la moindre oreille aux hurlements affamés de mon estomac. Cela contredit agréablement, et même étrangement à mon propre regard, la pente fataliste où je roule habituellement et selon laquelle ce qui doit arriver arrive, notre sagesse consistant surtout à devenir les spectateurs détachés de ce destin déjà tracé. Evidemment, cela ne fait jamais que trois semaines et demi, il est fort difficile de conjuguer l’intensité et la durée. Surtout pour moi dont l’enthousiasme évolue en dents de scie.

Pour tempérer ces satisfecit menaçant de devenir arrogants, je n’ai pas tout à fait échappé à l’effet PMG, malgré l’exercice physique. Mes jambes et mes fesses ont maigri, comme mes bras mais eux se sont clairement musclés. Mon ventre reste une poche de résistance, un territoire occupé par les derniers régiments de l’armée d’occupation adipeuse, même s’il a perdu de sa réplétion par rapport à l’époque où il faisait principalement office d’outre à vinasse.

Tout le travail de stabilisation est à venir, et j’ai horreur de ce mot : la vie n’est pas stable, c’est même son instabilité qui la rend vivante, les déséquilibres permanents changeant la donne et ouvrant la possibilité d’une différence. La répétition, c’est bon pour les minéraux et les morts. Et mon corps n’en est pas encore.

mardi 15 septembre 2009

L'âge de la machine à vapeur

Pour inaugurer mon cuit-vapeur, je ne fais pas les choses à moitié : j’achète mes légumes (poireaux, champignons, fenouil, poivron) chez le BIO ! Eh oui, vous avez bien lu, à mon tour je deviens un habitué du lieu que je conspuais voici à peine trois semaines. Je suppose que moi aussi, je dois désormais avoir l’air un peu maladif pour aller dans ce genre de boutique… En revanche, pas de poisson autre que surgelé et inabordable, du moins pour ma bourse très limitée du jour. Dommage parce que le poisson industriel, j’ai moyennement confiance.
Presque rien vendu en livres chez Gibert, et j’ai claqué une partie du pèze en m’achetant rue de Rennes un nouveau sac Manhattan Portage, toujours rouge vif, mais cette fois le tout petit format, très pratique pour sortir léger, très utile pour lutter contre ma tendance pathologique à emporter deux livres, trois magazines et un appareil photo quand je vais acheter un paquet de clopes au coin de la rue.

Chez Picard, ils ne sont pas capables de proposer un filet de cabillaud ou de colin tout seul, ils vendent par sachet de 4 ou 6. Résultat, je n’ai encore pas assez de pognon et je dois aller à Monoprix. Dans l’ensemble, je n’aime pas les magasins Picard, on dirait des morgues honteuses. Cela n’empêche qu’ils ont parfois de bons produits, je me souviens que je prenais jadis des patates sautées à l’ail et au persil, cuites dans la graisse de canard, le genre de plat pour lequel un Dukanien risque la peine de mort.

A Monoprix, j’ai fini par trouver unfilet de cabillaud à 4 euros. J’espère bien qu’il n’y a pas d’arête, je suis un phobique des arêtes depuis ma tendre enfance. Sans doute un héritage de mes parents, deux anxieux de première qui avaient toujours des histoires horribles à raconter, tel gosse mort en tombant la tête la première sur une terrasse en ciment, tel autre s’étant étouffé avec un œuf dur ou crevé l’intestin avec des arêtes, justement. De fait, la viande a cet avantage que l’on ne risque pas l’expérience très désagréable d’une épine plantée dans la gorge.

Découverte de la piscine Parmentier, la seule ouverte entre 18 et 22 heures. Correcte si l’on vient à l’ouverture, mais vite remplie ensuite. Un groupe de femmes en aquagym tressaute au ralenti et en cadence, sous les ordres d’un maître nageur aux jambes poilues, c’est drôle. Mes 500 mètres sont vite expédiés, je vais passer la semaine prochaine à 750. En me rhabillant dans la cabine, j’entends un mec parler à une fille. Il dit avec une voix lente et idiote, vous savez ces élocutions difficiles, excessivement articulées et malgré tout satisfaites d’elles, il dit donc à propos de je-ne-sais-quoi : « Ouais, c’est vrai que cela pousse à consommer [longue pause, j’ai le temps de mettre mon calebard et mon fute] mais moi je consomme in-tel-li-gent tu vois, c’est ça qu’est important tu comprends ». Je me dis que l’horizon mental de ce garçon et de ses clones me sera sans doute à tout jamais étranger.

Dehors il fait frais, et j’aime ça. Je suis toujours heureux en automne et au printemps, lorsque le temps change vite et que l’on sort des deux saisons de mort lente, été et hiver. Le pire étant quand même l’été, s’il est impossible de quitter la région parisienne pour trouver un coin adapté au soleil. Moi qui étais casanier, j’ai des envies de voyage de plus en plus fréquentes. Cela me fait penser qu’il faut à tout prix que je trouve une combine pour bouger lors des fêtes de fin d’année, hors de question que je subisse cette épreuve à Paris. Surtout la Saint-Sylvestre, qui me donne des pulsions de génocide.

Mais je chasse ces mauvais fluides pour concentrer ma pensée positive sur le mode d’emploi de Seb. 

Se remplir, se vider et lire Héraclite

A Monoprix, j’étais content d’avoir choisi du filet de canard pour changer et patatras, alors qu’il s'apprête à cuire sur la poêle, copine Peggy me dit au téléphone que cette volaille est prohibée par le Maître. Tant pis, j’en ai mangé la moitié. Ce ne fut pas ma journée cuisine : j’ai tenté de faire un pain de plus grande taille avec un moule à cake  acheté au BHV, et vous pouvez contempler ci-dessous le résultat.

Non, cela ne ressemble pas un pain. Ni à rien d’ailleurs. Mais cela reste comestible, je l’avais truffé d’un mélange ail-persil-échalotte. Ce soir, c’est la quille du PP, et demain, la découverte du cuit-vapeur. Grosse appréhension.

Un qui doit faire la gueule, c’est le caviste du coin. Il est là, juste à trente mètres, le premier magazin de vivres à portée de pas (le deuxième est un tabac, j’habite le quartier du vice). Depuis un an que je crèche ici, j’ai dû claquer 3000 euros chez lui. Je suis devenu un habitué en l’espace d’une semaine. Et là plus rien. Remarquez, même chose pour le boulanger, le charcutier ou le Subway. En revanche, la pharmacie où je ne mettais quasiment pas les pieds est sans doute ravie d’accueillir soudainement un client au transit si problématique.

Hier, j’achetais hier pour me remplir ; aujourd’hui, pour me vider. Tout tourne, comme disait ma tante Marguerite qui avait lu Héraclite. 

lundi 14 septembre 2009

Artillerie lourde

Les amis, nous sommes à la veille d’une guerre sans merci. De source bien informée, j’ai appris que copain Stéphane, se sentant menacé par la progression fulgurante de mon taux de masse musculaire, se gave actuellement de pâte et riz afin de commencer un programme secret Sylvester-Stallone à son club de gym. Il jure que non, mais je n’en crois pas un mot. Face à cette guerre éclair du biscoto, j’ai acquis en fin de semaine dernière mon arme secrète de musculation massive : CROISSANCE MUSCULAIRE MAXI PURE WHEY ! Rien que prononcer le nom dix fois, cela muscle la langue et les lèvres.

Je ne sais pas si l’on peut mourir d’une overdose de protéines, mais je suis sûrement à la quantité-limite qu’un corps peut supporter. Whey, cela veut dire « petit-lait ». Le produit se présente comme une poudre (parfumée vanille dans mon cas, mais on peut préférer chocolat), qu’il faut diluer dans l’eau, puis boire avant ou après l’effort. On dirait du sperme (mais je n’ai jamais produit un éjaculat de ce volume). Ce n’est pas très bon : une fois avalé, l’arôme vanille laisse une trace synthétique sur les papilles. Le matin, je le mélange à ma galette Dukan, cela passe mieux.

Un peu intrigué par cette histoire de « petit-lait », je suis parti à la pêche aux renseignements. C’est en fait du lactosérum, la partie liquide résiduelle quand un lait est coagulé. Dedans se concentrent les protéines du lait (caséines) ainsi que divers trucs aux noms savants : acides aminés soufrés (méthionine et cystéine), acides aminés à chaînes ramifiées (leucine, isoleucine et valine) et glutamine. Tout à fait impressionnant, je suis fier d’absorber autant de choses en deux cuillerées de poudre.

Wikipedia me précise : « Dans les années 70, l'utilisation quasi unique du lactosérum était l'alimentation du bétail ». Entre le whey et le son, je suis vraiment devenu un bœuf.

Variante radicale : le régime Alzheimer option Clostridium

Le dimanche en banlieue est aussi l’occasion d’une visite à mon père, en phase avancée de la maladie d’Alzheimer et en séjour de durée indéterminée dans un service de gérontologie psychiatrique rempli de cris et de murmures. Mon pauvre vieux a trouvé une solution plus radicale que la mienne : il ne mange plus. Vu qu’on le bourre de calmants. Vu que sinon, il retourne des baffes aux infirmières et aux toubibs. Alors on le perfuse, et il maigrit à vue d’œil, mon vieux. De surcroît, l’hôpital lui profite puisqu’il a chopé une maladie nosocomiale, le Clostridium difficile, bactérie faisant en gros office de Forlax permanent. Même diminué, il sera toujours plus fort que moi, l’aïeul.

dimanche 13 septembre 2009

Bouddha en MG 0%

Cela fait longtemps que je n'ai pas connu un tel réveil. Après six heures de sommeil, je me lève l'esprit vif et apaisé, le corps léger et reposé. C'est incroyable comme le même monde peut nous apparaître triste ou gai, serein ou menaçant, doux ou violent. Ce monde ne change guère, en fait, ou très lentement, seuls les indices que nous y cherchons et glanons varient avec nos humeurs. En tout cas, j'ai la sérénité d'un Bouddha ce matin... et certainement pas son tour de taille vu l'action nocturne du désormais fidèle Fruits'nFibres.

Au menu du jour, je continue le vaste rangement de la maison familiale où j'ai vécu environ 20 de mes années. Elle est désormais immense, vide, désertée de toutes les présences passées dont il ne reste que des fantômes discrets. Mais je ne ressens ni tristesse ni nostalgie, cela viendra peut-être plus tard. Avant, je profitais du dimanche matin pour faire le tour des commerçants du centre - et un poulet fermier par ici, une baguette aux céréales par là, des haricots chez Paulo, du vin chez Alain, du camembert chez Robert. Là, c'est fini, je trempe une tranche de poulet dégraissé dans une mayo Dukan. Il faudra quand même que j'organise un de mes futurs "repas de gala" dans cette maison, avant sa vente, en forme de dernier hommage à un lieu où j'ai bien bu et bien mangé. Enfin, bon, bien bu surtout.

La semaine prochaine, je dois trouver de la thune pour m'acheter un cuit-vapeur à l'occasion de mon retour en PL (tiens, je faire un lexique en marge pour les non-initiés). Quand copine Peggy en avait un, à la campagne, je me foutais gentiment de sa gueule en vérifiant l'état de mes frites surgelées dans le four. Les temps ont changé et je salive à l'idée d'envaporer légumes et poissons. Il faut dire que je suis totalement nul pour imaginer des préparations sans féculents, donc la simplicité de la cuisson vapeur me convient bien. Sur le papier du moins, sur le palais, je vous dirai cela plus tard.

samedi 12 septembre 2009

Introduction à la géodiététique

La géopolitique, c’est une discipline qui s’intéresse aux déterminations géographiques (au sens large) des stratégies politiques et militaires. Par exemple, si les Américains font du pâté d’Irakiens et rêvent de faire du hâchis d’Iraniens, ce n’est pas pour défendre le « monde libre » ou ce genre d’idéaux abstraits, mais plutôt pour s’assurer la mainmise sur le pétrole du Moyen-Orient et de l’Asie Centrale, ainsi que sur la sécurité de son transport (passage des oléoducs). Entre autres choses.

Mais je laisse ces considérations complexes aux chroniqueurs de France-Culture. Mon propos du jour concerne une discipline fondamentale que je viens d’inventer à l’instant : la géodiététique.

Vous allez vite comprendre.

Imaginez que vous vivez dans un pays africain où les famines sont récurrentes et où le niveau de vie est tel qu’un seul sac de son d’avoine provoque des émeutes villageoises et des massacres ethniques pour son appropriation. Les gens que vous croisez dans ce charmant pays, en dehors des humanitaires et des photoreporters, vont être plutôt maigres, et relativement à eux, vous (par exemple Occidental de poids moyen) serez plutôt gros.

Inversement, vous vous baladez dans le mall d’une ville nord-américaine, et vous allez croiser 35% d’obèses et 35% de baraqués, de sorte que maintenant, vous paraîtrez plutôt fluet dans cette foule mcdonaldisée depuis le berceau.

Voilà l’axiome de la géodiététique : le poids, donc le régime, de référence varie avec les lieux.

Si je cogite sur tout cela, c’est parce que j’habite dans le Marais. Qui est notoirement un quartier gay. Or, la plupart des gays – surtout les gays « visibles » si je puis dire, ceux qui boivent en terrasse et te matent ouvertement le cul – sont des gens très attentifs à leurs corps, par rapport à la moyenne des mâles hétéros. Ils sont donc souvent minces, musclés, et aussi bien sapés, moulants ou cintrés, pas les fringues informes des rappers hlmides et skaters pavtards que je croise aux Halles.

Je les en félicite, les gays, de pratiquer ainsi le souci de soi (ouais, j’ai des références coco, c’est du Michel Foucault, à ne pas confondre avec l’idole des Dukanettes, Jean-Pierre Foucault).

Mais du coup, c’est géodiététiquement contrariant pour moi : j’ai l’air obèse dans mon quartier, en tout cas mon ventre est clairement problématique, surtout en été où l’on ne peut pas le dissimuler.

Si j’échoue dans mon régime alimentaire et, au-delà, dans mon objectif anatomique, j’envisagerai peut-être de déménager en Allemagne, dans un quartier 100% hétéro, là où tous les gars sont gras.