lundi 9 novembre 2009

Lundi c'est l'ennui

Vanné, bien que j’aie beaucoup dormi, peut-être à cause de cela : quand on récupère du sommeil en retard, le redémarrage est difficile.

Ce matin, j’ai dû envoyer onze paquets suite à des commandes Amazon passées depuis samedi. Commence à m’emmerder ce petit commerce, c’est bien utile pour des revenus d’appoint, mais cela me prend trop de temps. Et puis cela me stresse, j’aime bien faire alors je passe une plombe à fignoler mes paquets, je suis terrorisé quand je découvre des pages cornées ou soulignées dans les livres que je vends, j’ai peur qu’ils puent la clope et que le client face un cancer du poumon rien qu’en l’ouvrant. À ce que j’observe, les gens commandent beaucoup le week-end. Je suppose qu’ils se font chier, alors ils compensent. La plupart vivent en province. C’est vrai qu’un dimanche en province, il y a parfois de quoi se tirer une balle. Déjà qu’un dimanche tout court ce n’est pas le jour le plus gai, alors quand vous vivez dans la boue avec des voisins mal fringués qui sortent tout rougeauds de leur repas de famille et qui vous regardent fixement avec un air hébété vu qu’ils n’ont strictement rien d’autre à foutre dans leur bled de merde où même les rats se sont pendus, je ne vous dis pas.

On parle partout de Berlin aujourd’hui. Dans les Inrocks de cette semaine, un dossier est consacré à la ville. Il paraît que c’est le nouveau cœur artistique de l’Europe, Paris et Londres sont déclassées. Dans le papier, Cyprien Gaillard, dont j’aime bien les photos et qui vit là-bas, explique : « Je payais 2000 euros à Paris pour rien. Ici, je peux avoir un 180 mètres carrés pour 850 euros, c’est bête mais ça fait toute la différence ». Ce n’est pas cela qui va me donner la pêche. J’ai enfin reçu mon éclairage, je l’ai monté, c’est parfait ; sauf qu’entre cela, et tous les livres que je rapatrie pour éviter la saisie, et toute la nécropole animalière que je bâtis lentement, je ne peux plus faire un seul mouvement sans me cogner.

Le fait est que cette putain de Capitale truffée de bureaux vides est hors de prix, vivement un krach à la mode tokyoïte et des loyers divisés par dix. Vivement aussi que je retrouve des revenus plus conséquents et que je me mette en quête de ce qui me manque toujours, l’espace. Mais ce n’est pas à Paris que je le trouverai. Il paraît que Bruxelles n’est pas chère, mais je n’aime guère cette ville, de manière sans doute injuste je l’assimile à une sorte de sous-préfecture remplie de paysans mal dégrossis et de fatmas marocaines. De toute façon, je crois que je préférerais de la place dans un trou pas trop loin de Paris, comme l’Auxerrois que je visitais hier, un coin où je puisse aller en deux heures maxi dans la semaine, où je puisse passer les week-ends et une partie des étés, où je puisse voir d’immenses perspectives vides et entendre de longs silences, sans trace d’humains, ou alors juste les cadavres d’un tueur en série, un coin d’où je puisse partir aussi vite que je suis venu, car l’overdose de campagne me saisit aussi facilement que celle de la ville, au fond c’est l’idée de pouvoir bouger qui me plaît, plus exactement de ne pas me sentir assigné à telle ou telle résidence par quelque nécessité que ce soit.

La semaine dernière j’ai trop mangé, et je constate aujourd’hui que j’ai du mal à résister à l’envie de grignoter. Je ne me suis pas pesé, j’ai la flemme depuis que j’ai mis la balance sous le lit au lieu de la pièce principale où elle trônait avant. C’est typiquement un problème lié à la place, d’ailleurs. Quand vous vivez dans un clapier, vous êtes obligés de ranger tout dans des espaces prenant le moins de place possible, au lieu d’étaler vos affaires dans les endroits de vos choix, correspondant à vos déplacements naturels. Résultat : soit vous oubliez ce que vous avez planqué dans un coin, soit les mille petits efforts nécessaires pour en user quotidiennement vous fatiguent, et vous finissez par laisser tomber. Enfin bref, il faut que je surveille mon alimentation, je retrouve une impression de lourdeur que je n’avais pas connue depuis longtemps.

En prévision de ma nouvelle résolution d’abandon de la clope, je tente des minisevrages d’une heure ou deux… et c’est horriblement difficile, cela me met très vite à cran, même avec la pipe en renfort. Je me demande si je ne devrais pas cesser juste avant Berlin : lors de la semaine là-bas, je n’aurai pas mes habitudes comme ici et je bougerai beaucoup. On verra. Là, je vais me poser sur le canapé, lire le beau livre sur Sarah Moon que j’ai acheté en fin de semaine dernière, laisser librement flotter mon esprit dans les volutes de fumée.

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