vendredi 30 octobre 2009

Des cabinets de curiosités aux greffes des cités

Copine Terraillon confirme ma remarquable stabilité : 64,7 kg ce matin. Copine La Poste m’amène une nouvelle fouine, la troisième, copain Joe est ravi de sa ménagerie, mon appartement devient lentement et sûrement l’étrange nécropole d’une faune sauvage.


J’aime les cabinets de curiosités qui ont connu leur âge d’or voici quelques siècles. Rien à voir ces collections monomaniaques qui se sont développées plus tard, il s’agissait une sélection choisie des raretés de la nature et de l’art, naturalia et artificalia, capables de faire réfléchir et rêver l’esprit.

L’horizon de ma journée est nettement moins plaisant que ces beaux musées privés ayant fleuri dans l’Europe savante d’un autre âge : je dois me rendre au lieudit « Immeuble Le Pascal, Centre commercial régional Créteil Soleil », plus précisément au greffe du Tribunal de commerce pour y déposer un nouveau dossier de liquidation. Étape nécessaire pour que la commission de surendettement prenne ensuite en compte mon dossier. Ma seule consolation est que cet endroit est accessible en métro, au terminus de la ligne 8 passant juste à côté de chez moi. Je mets à profit l’heure de transport pour terminer la biographie de Diane Arbus.

Créteil est grise sous le jour sans soleil, elle est de toute façon grise quelle que soit la météo. Des masses dont le vendredi est libéré par les RTT ou le chômage se pressent vers le centre commercial. La misère et le clinquant célèbrent leurs tristes noces. Je me trompe d’immeuble et rentre dans une Caisse d’assurance maladie. Le déguisement que j’avais inutilement choisi pour aller au Pôle Emploi parisien aurait été tout désigné ici, le lieu ressemble à sa caricature : bondé, coloré, sinistre.

J’atterris enfin à la bonne adresse. Évidemment, il manque un papier dans mon dossier, un obscur formulaire relatif aux privilèges de mes créanciers. La fille du greffe, très aimable, me dit qu’on peut le faire sur place. Pour 46 euros. Je prends immédiatement mon visage 14bis du jeune homme sympathique, affolé et accablé, je lui explique que je suis chômeur, sans nouvelle du RSA et sans un sou en poche, ce qui est d’ailleurs globalement vrai. Pleine de compréhension, elle s’en va débattre avec une personne invisible que je suppose être son supérieur direct et revient un large sourire aux lèvres, me disant que tout est arrangé. Je la remercie et songe qu’elle pourrait en faire de même ; car j’ai donné à son âme généreuse l’occasion d’exprimer sa charité et sa commisération, elle dormira mieux ce soir en pensant à tout le bien qu’elle a fait autour d’elle. Bien que j’ai vécu une liquidation en juin dernier, je joue patiemment le néophyte quand elle m’explique les procédures à venir – avoir l’air d’un habitué des prétoires la foutrait mal. Si j’ai un peu de bol, ils ne croisent pas les fichiers avec ceux du département voisin et ne verront pas que je plante là ma deuxième société en l’espace d’un trimestre. Rendez-vous le 18 novembre à 8h45 pour passer devant les magistrats, cette matinée promet d’être longue.

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