mercredi 21 octobre 2009

La société de consolation

Rencontrer une célibataire arabe, gagner 300 euros par jour, trouver une femme de ménage… je dois bien peu évoquer mon régime ces temps-ci, à en juger par les publicités que le robot Google place sur la page de garde. On ne peut pas dire que j’aide les braves gens qui tombent sur ce journal en glanant sur les moteurs de recherche quelques conseils pratiques dans leur quête du CORPS de RÊVE. Un régime, c’est un peu comme un mode d’emploi, on en suit scrupuleusement les directives et on obtient le résultat. Si le régime est efficace, bien sûr, mais il semble que Maître Dukan ne trompe pas ses disciples de ce point de vue. Les seuls conseils indispensables devraient finalement concerner la volonté de suivre les directives, c’est elle qui mène la danse.

S’il y a un dieu bon et tout-puissant, pourquoi le mal existe-t-il ? On cause de cela dans le poste ce matin, il paraît que des milliards de gens se sont posé cette question à travers les âges. Je me demande comment il est possible d’avoir une telle pensée, de perdre du temps dans ce genre de cogitation métaphysique. Chercher la solution arbitraire d’un problème dénué de sens, dès son énoncé… voilà donc ce que l’évolution a produit pour des milliards de cerveaux humains. Ce n’est pas une réussite, on sera au moins d’accord pour observer que la nature fait parfois mal les choses.

René est arrivé hier. René, c’est le chat de copine Natacha, elle a été le chercher dans un élevage du Perche. Comme tous les chatons ou presque, René est mignon. Du genre aimable, il ronronne comme une petite locomotive dès que vous le caressez. Les chats sont comme les humains, curieux de tout dans les jeunes années, revenus de tout dans leur âge adulte.

Devant l’église Saint-Paul, un corbillard sous la pluie. Trois croque-morts en uniforme, quelques familles floues sur le parvis humide, un pigeon indifférent picore un mégot.

Dans le métro en direction d’Olympiades, je crois reconnaître un homme barbu. Mais impossible de le situer dans ma mémoire. Cela m’arrive fréquemment, il doit exister des limbes de l’esprit, une zone floue où flottent des souvenirs indécis. Je pense à mon père, trois semaines que je ne l’ai pas vu, je pense à cette solitude dans des murs inconnus, je pense à ce silence dans les cris aigus des patients et les voix fortes des infirmières, je pense à la vie qui s’efface elle aussi, comme les souvenirs, comme toute chose, je pense à ceux qui cherchent consolation de ces misères dans un bon dieu et la trouvent sans doute. Heureux les simples d’esprit – mais je préfère encore la souffrance si ma lucidité a ce prix.

Pince-fesses à l’Institut pour fêter le nouveau site et l’année de travail qui l’a précédé, je décampe après dix minutes de brouhaha, quand on ferme les yeux et se concentre sur le flot confus des voix mêlées le tournis vient vite. À la sortie je passe à la médiathèque Melville, une biographie de Diane Arbus, une autre de Francis Bacon, un polar suédois. De quoi passer le temps quand la pluie bat mes fenêtres. J’aime cette grisaille uniforme et paisible des automnes. La réalité porte en elle et sa désolation et sa consolation, mais les hommes ne s'en satisfont pas, et leur société y trouve un puissant ciment.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire