mercredi 14 octobre 2009

Marchands du Temple et menaces millénaristes

La Bibliothèque Marguerite-Audoux est à deux pas de chez moi, dans la petite rue Portefoin. Manque de chance, bien qu’il soit mentionné comme disponible dans le catalogue informatique, il est impossible de mettre la main sur le livre de Pessoa que copine Sarah m’avait conseillé de lire, mais dont j’avais toujours retardé l’achat compte tenu de son prix. J’emprunte un livre sur Pierre Molinier, et le dernier Pascal Quignard.

En face de la bibliothèque, on trouve un grossiste en pierreries, ou simili telles, de la camelote. Ce qui m’agace, il faut dire qu’un rien m’agace depuis que Maître Dukan, la prohibition d’alcool et la restriction de tabac guident ma vie. Autour de la rue du Temple, tout le secteur est colonisé par des grossistes de bijoux de pacotille, maroquinerie ou vêtement. Hier c’était en majorité des Juifs, aujourd’hui les Chinois se démultiplient à vue d’œil. Je me fous totalement de leur origine, c’est le principe même d’un grossiste ayant vitrine sur rue qui me gêne. Puisqu’ils ne vendent pas aux particuliers, inutile d’occuper le précieux espace où ceux-ci viennent lécher ces vitrines toujours trop rares à mon goût. Ils n’ont qu’à faire leur trafic sur Internet, dans des entrepôts de banlieue ou des caves humides, mais loin de ma vue. En plus, leurs camions de livraison bouchent régulièrement les rues minuscules, les klaxons me déchirent les oreilles et les diesels m’asphyxient les poumons. Une vraie nuisance. Comme les éboueurs qui, pour une raison m’échappant, ont tendance à ramasser les poubelles entre 18 et 20 h, quand Paris grogne déjà de bouchons jusque dans la moindre venelle.

De Pologne je reçois un insecte prisonnier de l’ambre. Mais l’annonce était trompeuse et le format minuscule. En des jours meilleurs, je ferai sertir ce témoignage du passé sur une bague. La contemplation du vivant ainsi figé à l’état fossile me plaît. Elle rappelle la fugacité de l’existence, et la ténacité de ses traces. Nous creusons un sillon sur des terres inconnues, au bout desquelles le gouffre sans fond se rit de nos vertiges.

Copine Peggy me fait observer que l’on ne parle plus de la grippe A. De fait, l’actualité se concentre sur les boutons d’acné de Sarkozy Junior. Peut-être que l’influenza mutante attend l’hiver pour commencer le massacre. Peut-être que cette peur n’aura été que la enième manifestation de l’industrie médiatique de l’angoisse. Il n’y aurait rien de nouveau sous le soleil, on nous a fait trembler sur l’ozone, les pluies acides, la vache folle, les OGM et aujourd’hui le réchauffement climatique, à chaque fois dans un absurde déséquilibre entre les faits établis et les risques brandis. Comme une proportion non négligeable des manipulateurs de symboles vit de cette anxiété diffuse, il y a peu de chance que les choses changent. Nous sommes restés de petits primates grégaires écoutant le sorcier parler des abominables mystères et menaces de monde.

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